Saint-Louis Sucre/Fermeture d’Eppeville « Ce n’est que le début d’un combat »
Pour Dominique Fievez, président de la CGB dans la Somme, la fermeture des usines d’Eppeville et de Cagny est une réponse court-termiste du groupe Südzucker, faisant peser la grande majorité des efforts de réduction de production sur les usines françaises. Entretien.
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Quels sont les recours des producteurs face à cette fermeture ?
Dominique Fievez : Ce n’est que le début d’un combat. Nous sommes déterminés, et nous allons nous appuyer sur tous les leviers pour maintenir des usines, des emplois et un bassin de production. Nous avons déjà contacté la Région, les députés, jusqu’aux ministères, et à la présidence de la République. Tous partagent notre incompréhension.
Notre priorité est d’empêcher la fermeture de l’usine, mais dans un second temps, nous devrons peut-être envisager la reprise par quelqu’un d’autre. Face à cette décision unilatérale de Saint-Louis, nous avons d’ailleurs décidé d’organiser, le 1er mars, une manifestation devant les grilles de l’usine, avec les forces vives de toute la région, pour faire entendre le bon sens.
Quel serait l’effet de la fermeture d’Eppeville pour les producteurs ?
Environ 21 000 hectares de betteraves sont concernés par la fermeture de l’usine, sur quatre départements : l’Aisne, l’Oise, la Somme et le Nord-Pas-de-Calais. On nous explique qu’une partie de la surface sera transférée vers l’usine de Roye, à 25 kilomètres. Or sur Roye, on est déjà à 130 jours de fonctionnement, avec 14 000 tonnes par jour. Des hectares de betteraves seront donc forcément supprimés.
Comment les producteurs vivent-ils l’annonce de Saint-Louis concernant leur usine ?
Hier, à l’occasion d’une réunion à l’initiative de la CGB de la Somme, j’ai pu ressentir le mécontentement des exploitants, qui ne comprennent pas ce projet. Dans nos exploitations, nous avons toujours fait de la betterave, avec des performances agronomiques très intéressantes, et ça rentre dans nos assolements.
Et puis, autour de l’usine tout un tissu économique va en pâtir, avec 1 500 habitants, des commerces, des emplois induits. Les 132 salariés de l’usine ont notamment du mal à croire qu’il y aura de la place pour tout le monde à Roye, là où se trouvent déjà 220 autres salariés.
Où en sont les négociations avec les propriétaires de l’usine ?
Nous avons rencontré le président de Saint Louis Sucre au début de la semaine, mais c’est du côté de Südzucker, à Mannheim, que les choses se décident réellement. Nous allons rencontrer le groupe avec Franck Sander, le président de la CGB, et nous allons leur présenter des solutions alternatives à cette fermeture.
Südzucker veut diminuer sa production de sucre de 700 000 tonnes en Europe, en fermant cinq usines, deux en France, deux autres en Allemagne et une en Pologne. Mais la fermeture des usines françaises à elle seule signifie une baisse de 500 000 tonnes de production. Pour nous, il vaudrait mieux baisser la production de 15 % dans toutes les usines européennes pendant un ou deux ans, plutôt que de se priver d’un outil performant comme Eppeville.
La volatilité du marché peut-elle justifier cette fermeture ?
Si on ferme des usines à chaque fois qu’il y a des cours bas, et la situation risque de se reproduire, dans dix ans, il n’y aura plus d’usines du tout. Depuis la fin des quotas, les producteurs français ont augmenté leur production de 3 millions de tonnes, mais seule la moitié a été exportée, sur un marché mondial de 200 millions de tonnes.
Les responsables des mouvements de prix actuels sont les nouveaux pays producteurs, comme l’Inde, le Pakistan, ou la Thaïlande. Et dans cette période difficile sur le marché, nous espérons que ce ne sont pas les intérêts à court terme des actionnaires de Südzucker qui priment.
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